C’est certain que les outils qui existent aujourd’hui nous facilitent les choses et nous permettent aussi d’économiser question budget et question émissions de CO2.
Loïc Prévotat, Responsable Informatique de Greenpeace France
Bonjour Loïc, Greenpeace est connu dans le monde entier, mais pouvez-vous nous faire un rapide portrait-robot ?
Greenpeace est une ONG de protection de l’environnement, présente sur tous les continents, y compris sur l’eau avec une flotte de 3 bateaux. Son siège international se situe à Amsterdam et il existe 28 bureaux nationaux et régionaux, dont un à Paris. Nous sommes environ 70 personnes à travailler aujourd’hui pour Greenpeace France, mais nous accueillons également jusqu’à 50 bénévoles dans nos locaux.
Faire partie d’une ONG internationale, j’imagine que cela demande beaucoup d’échanges, de communication entre les différentes équipes ?
Au siège de Greenpeace International, 150 personnes travaillent essentiellement sur la coordination des actions et travaux des bureaux nationaux et régionaux. Il y a évidemment beaucoup de concertation pour élaborer les campagnes et tous les bureaux travaillent ensuite en collaboration pour assurer une certaine cohérence des messages et des actions.
Forcément, les TIC sont des outils indispensables pour parvenir à cette cohérence ?
Greenpeace est né au début des années 70, tandis que le bureau Français ouvrait en 1977, on n’a donc démarré à une époque sans internet ou téléphones mobiles. Ça n’empêchait pas d’avoir des résultats, mais c’est certain que les outils qui existent aujourd’hui nous facilitent les choses et nous permettent aussi d’économiser question budget et question émissions de CO². On continue de se réunir régulièrement sur des questions stratégiques, mais pour tout ce qui concerne les réunions de suivi projets on utilise beaucoup la visioconférence. La cohérence entre les différents bureaux a aussi sa part de contraintes, puisque dès qu’il s’agit de créer un nouvel outil, il faut qu’il puisse être mis en place par l’ensemble du réseau. Ça reste donc une contrainte plutôt saine au final.
Greenpeace France est inscrite au programme SolidaTech depuis novembre 2009, pouvez-vous nous expliquer l’intérêt pour vous ?
Greenpeace France a reçu 72 licences Microsoft pour une économie totale d’environ 11000 euros par rapport à leurs valeurs marchandes. Ça nous a permis de mettre tout le monde à niveau sur les applications bureautiques et de déployer un nouveau serveur. Dans le même temps, nous avons réduit le nombre de nos serveurs physiques internes, en mettant en œuvre des solutions de virtualisation. Ce qui nous a permis de réduire sensiblement la consommation électrique de notre infrastructure informatique, tout en gagnant en souplesse d'administration.
Avez-vous d’autres exemples des moyens mis en œuvre pour économiser votre budget et vos émissions de CO² ?
En ce qui concerne nos outils collaboratifs type groupware*, on bénéficie d’un contrat mondial avec Google, quasi gratuit en tant qu'ONG. Concernant, la téléphonie, on a aussi fait pas mal d’économies en passant sur une solution de voix sur IP, basée sur un IPBX* hébergé en interne. On peut ainsi multiplier les opérateurs téléphoniques, et ainsi sélectionner le plus compétitif pour chaque appel, en fonction de son type (vers l’international, le national, les mobiles…).
Par exemple, depuis la catastrophe de Fukushima, on a besoin de pouvoir communiquer de façon intensive avec le Japon, ce qui n’était pas le cas auparavant. Cette solution nous a donc permis de rapidement mettre en œuvre une offre alternative, réduisant nos coûts de communication vers cette destination et de façon totalement transparente pour nos utilisateurs. Enfin on a aussi fait l’économie du coût financier et environnemental des appareils téléphoniques (un téléphone IP coûte environ 100 €), puisque tous nos utilisateurs utilisent un logiciel de téléphonie depuis leur ordinateur (softphone), couplé à un micro-casque. Je précise également que notre fournisseur d’électricité est Enercoop, seul fournisseur à s'approvisionner à 100% auprès de producteurs d’énergies renouvelables.
On vient d’aborder les TIC comme outils de travail internes mais comment Greenpeace les utilise pour communiquer vers ses adhérents, ses bénévoles, le grand public ?
Il y a bien évidemment notre site internet et nos newsletters sur lesquels travaille une équipe de 3 personnes, mais aussi les médias et réseaux sociaux dont on essaye d’exploiter tout le potentiel avec un « Community manager » à plein temps. Cela nous permet de diversifier nos moyens de recruter des adhérents en plus de la dimension collecte de fonds, même si 75% des nouveaux donateurs s’engagent encore à partir de dispositifs offline (contre 95% il y a moins de 5 ans). Sur internet, on va plutôt avoir des donateurs uniques ou ponctuels qui réagissent par rapport à une actualité, comme la catastrophe de Fukushima pour reprendre cet exemple. Notre objectif reste néanmoins de sortir du format « pétition » pour parvenir à créer une vraie communauté de cyber-activistes que l’on pourrait mobiliser plus régulièrement en fonction des actions à mener. Là-encore la technologie n’est qu’un facilitateur car les actions existaient avant, comme lorsque nous avions mobilisé un réseau de détectives* dans le cadre de la campagne OGM.
On a évoqué votre présence sur les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, YouTube…), que fait Greenpeace sur les autres outils qui sont apparu plus récemment ? Je pense notamment aux applications pour mobiles.
C’est un des gros sujets de réflexion du moment. Les mobiles sont très utilisés par certains bureaux pour la collecte de fonds, notamment en Turquie et en Chine et plus généralement dans les pays en voie de développement. Chez Greenpeace France, on pense que les réseaux sociaux sont justement plus adaptés pour ces besoins et on recherche plutôt à utiliser les mobiles pour soutenir nos campagnes, pour réunir et animer la communauté des adhérents et militants. Par contre nous avons une vraie réflexion sur les applications smartphones comme par exemple un catalogue ou un guide des produits avec et sans OGM. Dans l’idéal, on souhaiterait que les utilisateurs puissent tirer des informations directement d’un flashcode* qui serait présent sur tous les produits. Mais vous voyez que ce n’est pas quelque chose qui peut être mis en place du jour au lendemain.
On voit qu’il y a déjà beaucoup d’outils en fonction et beaucoup de projets dans les tuyaux. Existe-il d’autres manques que vous n’avez pas encore solutionnés, sur lesquels SolidaTech pourrait vous aider ?
Il y a l’aspect travail collaboratif sur lequel il y a toujours des améliorations possibles, notamment dans le domaine de l’échange de savoirs et la transmission d’informations. Nous étudions en ce moment même différentes solutions, offrant de larges capacités d’interactions entre les personnes, tout en incluant des fonctionnalités de gestion de projet qui restent essentielles.
L’une des fédérations nationales avec lesquelles nous travaillons a mis en place un réseau social interne qui fonctionne a peu près comme Facebook. Ça peut être une piste de travail. C’est grâce à ce type d’échange que le programme AdB-SolidaTech pourra répondre au plus grand nombre de besoins exprimés par le secteur associatif, en capitalisant sur les expériences et pratiques d’autres associations, y compris celles qui évoluent dans d’autres domaines activités.
Merci Loïc pour cet échange et merci de nous avoir donné un aperçu des coulisses de Greenpeace !
Propos de Loïc Prévotat, Responsable Informatique de Greenpeace France, recueillis par Vincent Blanchard, Responsable du programme SolidaTech.
* groupware : logiciel de partage de document et de travail collaboratif (comme Microsoft Exchange par exemple ou encore eGroupware)
* IPBX : système utilisé en entreprise qui assure l'acheminement de toute ou partie des communications en utilisant le protocole internet (IP), en interne sur le réseau local (LAN) ou le réseau étendu (WAN) de l'entreprise. (source : http://fr.wikipedia.org/wiki/IPBX)
* détective OGM : il contribue à repérer les OGM dans les produits alimentaires, à les éliminer des rayons de son supermarché et ainsi à montrer aux industriels de l'agroalimentaire qu’il n’en veut pas dans son assiette
* flashcode : sous forme de modules noirs dans un carré à fond blanc, il permet une fois scanné et décodé d’accéder à un plus grand nombre d’informations qu’un code barres traditionnel. Les flashcodes peuvent mémoriser des adresses web, du texte, des numéros de téléphone, des SMS ou autres types de données. (source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Code_QR)